CAHIER DES PLAINTES, DOLEANCES ET REMONTRANCES DES HABITANTS DE PALAISEAU
Aujourd’hui mercredi 15 avril 1789, en l’assemblée convoquée au son de la cloche en la manière accoutumée, tenue en la grande salle du château de Palaiseau, en présence de M. François Boys, ancien avocat au parlement, bailli de Palaiseau, en exécution des lettres de convocation des états généraux données à Versailles le 24janvier dernier, et de l’ordonnance de M. le lieutenant civil du châtelet de Paris, en date du 4 de ce mois ; les habitants du bourg et paroisse du dit Palaiseau ont rédigé le présent cahier, contenant leurs plaintes, doléances et remontrances, pour être porté à l’assemblée du tiers-état de la prévoté et vicomté de Paris, par les cinq députés qui seront à cet effet nommés ainsi qu’il suit:Art. 1er
Le premier soin comme le premier devoir des états généraux est de supplier le roi d’agréer, de la part de la nation, une adresse de remerciements conçue en termes qui peignent à Sa majesté toute la vénération dont la nation est pénétrée pour Sa personne sacrée, et toute la reconnaissance qu’elle conservera à toujours pour le bienfait quelle reçoit aujourd’hui d’elle, dans le rétablissement des état généraux, et les sacrifices que Sa majesté a faits au bien public d’une autorité sans bornes.Art. 2.
Il sera déterminé par les états généraux que la France est une monarchie héréditaire de mâle en mâle, l’ordre de la primogéniture et la représentation de lainé mâle gardés, les femelles a toujours exclues, ainsi que leurs représentants que la puissance législative appartient A la nation assemblée Cii états généraux, conjointement avec le roi qu’en cas de minorité du roi, à la nation seule assemblée en états généraux appartient de donner la régence du roi et du royaume, soit à la reine, soit à tel prince du sang royal que la nation en juge digne.Art. 3.
Sur tout ce qui concerne les lois constitutionnelles, telles que le retour périodique des états généraux, la liberté individuelle, la liberté de la presse, les propriétés et autres objets majeurs, la communauté des habitants de Palaiseau, après avoir pris lecture du cahier de la noblesse des bailliages de Melun et Moret, tel qu’il a été remis à M. Fretcau, conseiller au parlement, le vendredi 20mars dernier, a pensé ne pouvoir mieux faire que d’adhérer aux quatorze premiers articles de ce cahier, le quinzième exclu, comme impliquant contradiction avec le premier, et le huitième article du même cahier.Art. 4.
Les députés aux états généraux auront un pouvoir indéterminé pour remédier aux abus qui affligent le royaume, et faire toutes les lois et règlements propres à amener un meilleur ordre dans toutes les parties de l’administration politique, civile et ecclésiastique, on leur recommandera d’abord l’union et l’intelligence, nécessaires dans cette occasion, la plus importante qui jamais se soit présentée, et à laquelle le salut de l’état est attaché.En second lieu, de s’attacher à former nos lois constitutionnelles et de considérer que cette base du bonheur public une fois posée, la réforme des abus et de tous les établissements les plus parfaits, les plus utiles à la nation, s’opérerait avec la plus grande facilité.
Art. 5.
Le consentement unanime des trois ordres à supporter, l’impôt, chacun en proportion de ses facultés est le meilleur augure du nouveaux régime qui va s’établir.
Les honneurs, les dignités, les récompenses pécuniaires sont la juste récompense de la vertu et des services que l’on rend à Sa patrie il ne faut donc pas les envier à ceux qui les obtiennent, mais ne serait-il pas à désirer que l’état du soldat fût mieux payé et plus honoré qu’il ne l’est encore en France ? Et pourquoi, cet égard, la noblesse seule obtiendrait-elle tout en partage ? Nous pensons qu’il est également juste et utile à l'Etat.
1° Que la solde du soldat soit augmentée, et qu’il ne soit sous les drapeaux, en temps de paix, qu’un certain temps de l’année, et pour le surplus du temps rendu aux travaux de l’agriculture.
2° Que le moyen meilleur d’éviter les désertions est de donner aux soldats la perspective d’une pension et d’une distinction, après un temps de service, pension qui augmenterait en raison de la durée de ses services.Art. 6.
La destruction totale des lapins à cet effet, qu’il soit permis à tous propriétaires et locataires, dans chaque paroisse, de les détruire par toutes sortes de moyens, à l’exception du poison et du fusil.Art. 7.
La suppression des banalités de fours, pressoirs, moulins des dîmes et champarts et dans le cas d’impossibilité, les convertir en une prestation en argent.Art. 8.
Que l’impôt sous le nom d’industrie soit absolument supprimé, ne pouvant jamais être réparti avec équité entre les contribuables, et mettant des entraves au commerce.Art. 9.
Que les droits casuels des fabriques et des ecclésiastiques soient également supprimés, comme contraires aux principes de la religion catholique.Art. 10.
Qu’il soit permis à tout cultivateur de récolter ses grains, foins et autres fruits, de nettoyer et sarcler ses grains quand bon lui semblera, sans être tenu à faire aucune soumission et à toujours, même les dimanches et fêtes, hors les heures du service divin.Art. 11.
Que le bureau de la charité des pauvres de cette paroisse soit, à l’avenir, administré par trois notables choisis par l’assemblée de la paroisse, concurremment avec les administra-teurs nés de ladite charité, qu’il soit fait à la diligence des mêmes notables, des recherches pour connaître le revenu des écoles gratuites, et ensuite fait de nouveaux règlements, y ayant des abus dans l’administration desdites écoles.Art. 12.
Que chaque paroisse ou communauté soit tenue de soulager ses pauvres, qui seront astreints de demeurer dans leurs paroisses, et que ceux trouvés hors de leurs paroisses soient arrêtés.Art. 13.
Que la justice soit rendue aux malheureux comme aux riches, avec moins de lenteur et de frais que tous officiers publics, dépositaires de deniers, comme notaires, greffiers, huissiers priseurs et autres, soient tenus de rendre compte des sommes qu’ils auront reçues à titre de dépôt ou autrement, à l’instant de la demande qui leur en sera faite, et, en cas d’opposition ou empêchement, de les déposer dans le trésor de la nation.Art. 14.
Supprimer les corvées de toutes espèces, et augmenter les brigades de maréchaussée, pour sûreté du public, surtout dans les temps de disette et de cherté du pain.Art. 15.
Que chaque paroisse soit autorisée à répartir elle-même l’imposition à laquelle elle aura été taxée, sans le secours ni interposition des commissaires choisis par MM. les intendants, et que les particuliers ne possédant aucun bien-fonds, et ne jouissant que du travail de leurs mains, ne soient pas compris dans le rôle des impositions.Art. 16.
Que l’exportation des grains soit absolument interdite hors du royaume, et solliciter des règlements pour que les marchés soient fournis en tout temps de grains, à proportion de la consommation.Art. 17.
Que les cultivateurs ne soient pas assujettis de faire épiner leurs terres, cette charge devant être supportée par ceux qui ont droit de chasse.Art 18.
Qu’il soit fait des règlements qui astreignent les propriétaires de pré à curer les petites rivières et boèles, pour prévenir les inondations des prairies occasionnées par le défaut du curage, qu’il soit donné à chaque meunier la quantité d’eau convenable et qu’il soit pratiqué des versoirs à des hauteurs fixes, pour faciliter l’écoulement des eaux et empêcher notamment, lors de la fauche, la submersion des foins, ce qui est très fréquent dans la prairie de Palaiseau.Art. 19.
Que les privilèges des maîtres de poste aux chevaux soient supprimés, n’étant pas naturel que les habitants d’une paroisse payent les chevaux aux voyageurs étrangers à la même paroisse.Art20
Que chaque particulier soit maintenu et conservé dans Sa propriété, et, s’il y a nécessité d’ouvrir une nouvelle route qu’elle ne puisse être pratiquée qu’au préalable le proprié-taire de l’héritage n’ait été remboursé, à dire d’experts, tant du fonds que des arbres et récoltes qui se trouveront dessus.Art. 21.
La suppression totale des pigeons, ainsi que de la milice accablante et ruineuse pour la partie la plus indigente et la plus malheureuse de campagnes.Art. 22.
Que défense soit faite à tous gardes chasses, leurs chiens et aux herbiers, d’aller dans les grains, depuis le premier mai jusqu’après la récolte des fruits et grains suppression totale des capitaineries, droits d’aides, gabelles, péages, plaçages, barrages, pontonnages et passages qu’il n’y ait qu’un seul poids et une seule mesure et une loi uniforme, s’il est
possible dans tout le royaume.Art 23.
Demander la réduction du gibier et, entre autres choses de la bête fauve demander pareillement la suppression de la forme prescrite par les arrêts des 2t juillet f778 et 15 mars t779, pour parvenir à constater les délits causés par le gibier et la suppression des remises dans la plaine.
Art. 24.
Demander que le projet du canal des rivières de Bièvre et d’Yvette soit anéanti, n’étant d’aucune utilité publique, mais seulement un objet de spéculation très préjudiciable à la paroisse de Palaiseau et de plus de trente autres circonvoisines.Art. 25.
Que la faculté soit accordée à tous citoyens de faire vendre à l’encan ses meubles, en le faisant néanmoins publier et afficher une huitaine auparavant, sans être assujettis d’appeler un huissier priseur plutôt que tous les autres officiers publics au choix des parties, même en cas d’indemnité ou de vente ordonnée en justice, supprimer les quatre deniers par livre et assujettir les huissiers à la taxe des frais de vente.Art. 26.
Il existe, à Palaiseau, un prieur qui a le titre de curé, et qui jouit d’environ 3000 livres de rente Sa seule charge est de lire son bréviaire, et depuis 30 ans que M. l’abbé Bertun en est le titulaire, on ne l’a pas même aperçu à Palaiseau ce qu’on peut faire de mieux après Sa mort, est de supprimer ce prieuré, et d’en affecter les revenus, d’abord à la subsistance du curé de la paroisse, et le surplus à l’Hôtel-Dieu de ladite paroisse, qui a beaucoup de pauvres et peu de revenus.Fait et arrêté en ladite assemblée, les jour, mois et an que dessus, et avons signé avec ceux desdits habitants qui le savent.
Signé Angiboust; BIondé; Boys; Buisson; Culer; Chartier; Chatelle; Chretien; Christophe Etienne; Clémenceau; Cretel André; Delamarre; Delamarre; Dufour; Fosse; Fremin; Gaudry; Gerson; Ge,vais; Jacques; Jacquier; Lainé Charles; Lemarque; Leblanc NoèI; Lecalon; Lecalon; Lemerle; Lemerle; Lemerle Antoine; Lerondeau; Lertax; Maillot; Marchand; Mellon; Ovule; Pescheux; Picard; Pigeon; Pigeon; Prévost; Prieur Germain; Racary; Rioux; Aousseau; Simon; Tonnerre Jean; Varin; Vilaine Jean Pierre; Savy, greffier.
Source: Thierry E.Mise à jour le 28 novembree 2001